Brahms Ein deutsches Requiem
Musique de Johannes Brahms (1833-1897)
Création : Gewandhaus, Leipzig, 18 février 1869
Un des premiers actes de la nouvelle direction de l’Opéra de Monte-Carlo fut le lancement d’une série de concerts destinée à enrichir l’univers du chœur de l’Opéra et à dévoiler au public l’étendue de ses capacités. Après le Stabat Mater de Rossini la saison dernière et le Requiem de Verdi cette saison, c’est au tour d’Un requiem allemand de Johannes Brahms d’être présenté dans ce cadre. Entre 1857 et 1868, le compositeur est bouleversé par la disparition de deux êtres proches : celle de Robert Schumann, son mentor, puis celle de sa propre mère. Ces deux événements le pousseront à élaborer ce qui deviendra son passeport pour la gloire. Créée en 1869, cette œuvre sacrée, mais pas liturgique, lui ouvrira le monde de la musique symphonique, un univers qu’il avait jusque-là hésité à embrasser. Même si la volonté de son auteur d’en faire une œuvre œcuménique n’a pu se concrétiser, son caractère humaniste transpire au travers d’une écriture inspirée, vibrante d’émotions intérieures plus qu’ostentatoires. À mi-chemin entre la cantate funèbre baroque par sa forme et l’oratorio romantique par son effectif, Un requiem allemand est une œuvre idéale pour permettre aux Musiciens du Prince – Monaco, menés par Gianluca Capuano, de restituer pleinement les sonorités d’époque grâce à leur approche sensible de la musique du XIXe siècle.
LES MUSICIENS DU PRINCE – MONACO
Chef d'orchestre
Gianluca capuano
Chef de chœur
stefano visconti
solistes
Soprano
REGULA MÜHLEMANN
Baryton
FLORIAN BOESCH
CHŒUR DE L’OPÉRA DE MONTE-CARLO
Chef de chœur
Stefano Visconti
Consultant pour l’organisation musicale & assistant chef de chœur
Aurelio Scotto
Régisseuse du chœur & bibliothécaire
Colette Audat
Sopranos I
Damiana Avogadro*
Galia BAKALOV
Antonella CESARIO
Chiara IAIA
Mariko Izuka*
Giovanna MINNITI
Felicity MURPHY
Biagia Puccio*
Ilenia Tosatto*
Vittoria Vitali*
Ronja Weyhenmeyer
Sopranos II
Ingrida Gapova
Vittoria Giacobazzi
Valérie Marret
Letizia Pianigiani
Laura Maria Romo Contreras
Mezzo-sopranos
Teresa BRAMWELL-DAVIES
Géraldine MELAC
Suma MELLANO
Federica SPATOLA
Altos
Ornella Corvi
Francesca Copertino*
Maria-Elisabetta De Giorgi
Chiara La Porta*
Matilde Lazzaroni*
Catia Pizzi
Paola Scaltriti
Leonora Sofia*
Rosa Tortora
Viktoria Tkachuk*
Ténors I
Walter Barbaria
Lorenzo Caltagirone
Domenico Cappuccio
Thierry Di Meo
Vincenzo Di Nocera
Benoît Gunalons*
Nicolo La Farciola
Sergio Martella*
Manfredo Meneghetti*
Davide Urbani*
Halil Ufuk Aslan*
Ténors II
Gianni COSSU
Pasquale FERRARO
Fabio MARZI
Adolfo SCOTTO DI LUZIO
Salvatore TAIELLO
Barytons
Fabio BONAVITA
Vincenzo CRISTOFOLI
Daniele DEL BUE
Luca VIANELLO
Basses
Andrea Albertolli
Stefano Arnaudo*
Przemyslaw Baranek
Paolo Marchini
Max Medero*
Armando Napoletano*
Edgardo Rinaldi
Kyle Patrick Sullivan*
Matthew Thistleton
Giuseppe Zema*
*choristes supplémentaires pour ce concert
LES MUSICIENS DU PRINCE-MONACO
Premiers violons
Plamena Nikitassova
Julia Rubanova
Fabrizio Cipriani
Muriel Quistad
Roberto Rutkauskas
Anaïs Soucaille
Agnes Stradner
Elena Telo
Anna Urpina Rius
Andrea Vassalle
Seconds violons
Nicolas Mazzoleni
Nikita Budnetskiy
Laura Cavazzuti
Francesco Colletti
Svetlana Fomina
Reyes Gallardo
Gian Andrea Guerra
Diego Moreno Castelli
Matilde Tosetti
Altos
Diego Mecca
Patricia Gagnon
Elisa Imbalzano
Emanuele Marcante
Massimo Percivaldi
Bernadette Verhagen
Violoncelles
Robin Geoffrey Michael
Nicola Brovelli
Anna Camporini
Guillaume François
Antonio Carlo Papetti
Emilie Wallyn
Contrebasses
Roberto Fernández de Larrinoa
Clotilde Guyon
Maria Vahervuo
Flûtes
Jean-Marc Goujon
Rebekka Brunner
Piccolo
Rebekka Brunner
Hautbois
Pier Luigi Fabretti
Guido Campana
Clarinettes
Bernhard Roethlisberger
Roberta Cristini
Cors d’harmonie
Ulrich Hübner
Dileno Baldin
Gilbert Camí Farràs
Claude Padoan
Bassons
Benny Aghassi
Ivan Calestani
Trompettes
Gabriele Cassone
Antonio Faillaci
Trombones
Seth Quistad
Marco Rodrigues
Billie Thomas
Tuba
Daniel Ridder
Timbales
Paolo Nocentini
Harpe
Marta Graziolino
Johannes Brahms (1833-1897)
Ein deutsches Requiem nach Worten der Heiligen Schrift, op. 45
[Un requiem allemand d’après les textes des Saintes Écritures]
Pour soprano et baryton solos, chœur mixte et orchestre symphonique
I. Chœur : «Selig sind, die da Leid tragen» – Ziemlich langsam und mit Ausdruck [Assez lent et avec expression]
II. Chœur : «Denn alles Fleisch ist wie Gras» – Langsam, marschmäßig [Lent, mouvement de marche]
III. Baryton et chœur : «Herr, lehre doch mich» – Andante moderato
IV. Chœur : «Wie lieblich sind deine Wohnungen» – Mäßig bewegt [Modérément animé]
V. Soprano et chœur : «Ihr habt nun Traurigkeit» – Langsam [Lent]
VI. Baryton et chœur : «Denn wir haben hie keine bleibende Statt» – Andante
VII. Chœur : «Selig sind die Toten» – Feierlich [Solennel]
Une foule de deux mille personnes s’était pressée en la cathédrale de Brême, ce 10 avril 1868, Vendredi saint, pour assister à la création d’Un requiem allemand. Ce concert signa la consécration du compositeur de 36 ans, qui était déjà au faîte de son métier mais n’était encore connu que d’un cercle restreint. Parmi ces admirateurs figurait Clara Schumann. Quinze ans plus tôt, son époux Robert avait décelé le génie du jeune pianiste venu se présenter à lui ; puis Schumann avait sombré dans la folie et s’était éteint en 1856. Ce choc fut le déclencheur du Requiem allemand : Brahms commença bientôt à sélectionner des textes et, en 1861, il composa la musique des deux premiers mouvements. L’élaboration s’étira ensuite longuement, jusqu’à ce que le décès brutal de sa mère, en 1865, lui donne l’impulsion décisive («Nous pensons tous qu’il l’a écrit en souvenir d’elle, bien qu’il ne l’ait jamais dit explicitement», confia Clara Schumann à la biographe de Brahms Florence May).
Luthérien, Brahms ne pouvait illustrer le texte latin de la messe des morts en vigueur chez les catholiques depuis le Concile de Trente (1545-1563) – celui qu’avaient mis en musique, avec plus ou moins de fidélité, Mozart, Berlioz, Verdi, Fauré ou Duruflé. En lecteur assidu de la Bible, il fit donc son propre choix parmi les textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, dans la traduction allemande de Martin Luther. Cela explique certainement pourquoi Vienne la catholique était restée froide, quelques mois plus tôt, à l’exécution en avant-première de trois mouvements de l’œuvre.
Brahms donna à son requiem un caractère profondément méditatif, à mille lieues des visions apocalyptiques développées dans la messe catholique et en dehors de toute visée liturgique. L’article indéfini du titre souligne le caractère subjectif de la partition, et le qualificatif d’«allemand» renvoie au choix de la langue vernaculaire, sans aucune arrière-pensée nationaliste. À Carl Martin Rheintaler, le chef qui dirigea la création et avait demandé au compositeur si l’absence de référence au Christ dans l’œuvre ne devait pas être compensée d’une manière ou d’une autre, l’auteur fit cette réponse lapidaire : «Quant au texte, j’avoue que je supprimerais volontiers aussi le mot “allemand” et que je mettrais simplement “humain”.»
La partition
Dans les années 1857 à 1864, le jeune Brahms avait dirigé des chœurs à Detmold, Hambourg, puis Vienne. Johann Sebastian Bach, Giovanni Pierluigi da Palestrina, Heinrich Isaac, Johannes Eccard ou Heinrich Schütz figuraient en bonne place dans sa bibliothèque musicale, et l’exemple de ces maîtres anciens transparaît dans les nombreuses partitions chorales qu’il composa dans ces années-là. Ces expériences fructifièrent dans Un requiem allemand.
Pour autant, cette partition est d’une expression profondément personnelle et romantique. Comme tant d’œuvres de Brahms, elle chemine de l’ombre à la lumière, du premier mouvement (privé de violons) à l’accord final (illuminé par la harpe et les flûtes). Le premier mot et le dernier sont identiques : «selig» (bienheureux), qui enrobe la partition dans ses bras consolateurs («Bienheureux les affligés, car ils seront consolés !»). Cette béatitude est par deux fois écornée : dans la sinistre marche funèbre du second mouvement, scandée par la timbale, qui rappelle le caractère éphémère de la vie («Toute chair est comme l’herbe, Et toute la gloire de l’homme comme la fleur de l’herbe») ; et dans l’avant-dernier mouvement, le plus dramatique, où le baryton prophétique annonce l’Apocalypse. Peut-être est-ce pour atténuer cette douleur que Brahms ajouta, après la création à Brême, le cinquième mouvement avec soprano solo, où le chœur cite Ésaïe : «Je vous consolerai comme une mère console son fils.» En illustrant ce passage avec une musique d’une beauté sublime, Brahms se souvenait certainement de sa propre mère.
Claire Delamarche ©Opéra de Monte-Carlo 2023
Johannes Brahms (1833-1897)
Ein deutsches Requiem nach Worten der Heiligen Schrift, op. 45
[Un requiem allemand d’après les textes des Saintes Écritures]
Pour soprano et baryton solos, chœur mixte et orchestre symphonique
1. Selig sind, die da Leid Tragen,
denn sie sollen getröstet werden.
(Matthäus 5:4)
Die mit Tränen säen,
werden mit Freuden ernten. Sie gehen
hin und weinen und tragen edlen
Samen, und kommen mit Freuden und
bringen ihre Garben.
(Psalm 126:5-6)
2. Denn alles Fleisch, es ist wie Gras,
und alle Herrlichkeit des Menschen
wie des Grases Blumen. Das Gras
ist verdorret und die Blume abgefallen.
(1 Petrus 1:24)
So seid nun geduldig, lieben
Brüder, bis auf die Zukunft des
Herrn. Siehe, ein Ackermann wartet auf
die köstliche Frucht der Erde und ist
geduldig darüber, bis er empfahe den
Morgenregen und Abendregen.
(Jakobus 5:7)
Aber des Herrn Wort bleibet in
Ewigkeit.
(1 Petrus 1:25a)
Die Erlöseten des Herrn werden
wieder kommen, und gen Zion
kommen mit Jauchzen.
Ewige Freude wird über
ihrem Haupte sein : Freude und Wonne
werden sich ergreifen und Schmerz und
Seufzen wird weg müssen.
(Jesaja 35:10)
3. Herr, lehre doch mich, dass ein
Ende mit mir haben muss,
und mein Leben ein Ziel hat,
und ich davon muss.
Siehe, meine Tage sind einer Hand
breit vor Dir, und mein Leben ist
wie nichts vor Dir.
Ach, wie gar nichts sind alle
Menschen, die doch so sicher leben.
Sie gehen daher wie ein
Schemen, und machen ihnen viel
vergebliche Unruhe ; sie sammeln
und wissen nicht wer es kriegen wird.
Nun Herr, wes soll ich mich trösten ?
Ich hoffe auf Dich.
(Psalm 39:5-8)
Der Gerechten Seelen sind in
Gottes Hand und keine Qual
rühret sie an.
(Weisheit 3:1)
4. Wie lieblich sind deine
Wohnungen, Herr Zebaoth !
Meine Seele verlanget und sehnet
sich nach den Vorhöfen des
Herrn ; mein Leib und Seele
freuen sich in dem lebendigen Gott.
Wohl denen, die in deinem Hause
wohnen, die loben dich immerdar.
(Psalm 84:1-2,4)
5. Ihr habt nun Traurigkeit ;
aber ich will euch wieder sehen und
euer Herz soll sich freuen und
eure Freude soll niemand von euch nehmen.
(Johannes 16:22)
Sehet mich an : Ich habe eine
kleine Zeit Mühe und Arbeit gehabt
und habe großen Trost funden.
(Jesus Sirach 51:35)
Ich will euch trösten, wie einen
seine Mutter Tröstet.
(Jesaja 66 :13a)
6. Denn wir haben hie keine
bleibende Statt, sondern die
zukünftige suchen wir.
(Hebräer 13:14)
Siehe, ich sage euch ein Geheimnis :
Wir werden nicht alle entschlafen,
wir werden aber alle verwandelt werden.
Und dasselbige plötzlich
in einem Augenblick
zu der Zeit der letzten Posaune.
Denn es wird die Posaune schallen und
die Toten werden auferstehen unverweslich,
und wir werden verwandelf werden.
Dann wird erfüllet werden das Wort :
„ Der Tod ist verschlungen
in den Sieg. ”
Tod, wo ist dein Stachel !
Hölle, wo ist dein Sieg !
(1 Korinther 15:51-52, 54b-55)
Herr, du bist würdig zu nehmen
Preis und Ehre und Kraft, denn du
hast alle Dinge erschaffen, und durch
deinen Willen haben sie das Wesen und
sind geschaffen.
(Offenbarung 4:11)
7. Selig sind die Toten, die in dem
Herren sterben, von nun an !
Ja der Geist spricht, dass sie ruhen
von ihrer Arbeit ; denn ihre Werke
folgen ihnen nach.
(Offenbarung 14:13b)
I. Bienheureux ceux qui souffrent
car ils seront consolés.
(Matthieu 5:4)
Ceux qui sèment dans les larmes
moissonneront dans la joie. Ils s'en
vont en pleurant et emportent la noble
semence. Ils s'en retournent dans la joie
et rapportent les gerbes de leur moisson.
(Psaume 126:5-6)
II. Car toute chair est comme l'herbe,
et toute la gloire de l'homme est
comme la fleur de l'herbe,
L'herbe sèche et la fleur tombe.
(1 Pierre 1:24)
Prenez donc patience, mes chers
frères, jusqu'à l'avènement du
Seigneur. Voyez, un laboureur attend
le précieux fruit de la terre et prend
patience jusqu'à ce qu'il reçoive la
pluie du matin et la pluie du soir.
(Jacques 5:7)
Mais la parole du Seigneur demeure
éternellement.
(1 Pierre 1:25)
Ceux que l'Éternel aura rachetés
reviendront à Sion
avec des chants de triomphe.
Une joie éternelle sera sur
leur tête : joie et allégresse
s'empareront d'eux ; douleur et
gémissements devront s'enfuir.
(Esaïe 35:10)
III. Seigneur, fais-moi savoir que mon
existence doit avoir une fin,
que ma vie a un terme
et que je dois partir d'ici-bas.
Vois, mes jours sont de la largeur
d'une main face à toi, et ma vie est
devant toi comme un rien.
Ah, tous les hommes, pourtant si sûrs
d'eux, ne sont que néant.
Ils marchent comme des
ombres et s'agitent en
vain ; ils amassent des biens
et ne savent pas qui les recueillera.
Seigneur, que dois-je attendre ?
Mon espérance est en toi.
(Livre de la Sagesse 3:1)
Les âmes justes sont dans
la main de Dieu, et nul tourment
ne les atteint.
(Livre de la Sagesse 3:1)
IV. Que tes demeures sont aimables,
Seigneur des armées !
Mon âme soupire et languit
après les parvis du
Seigneur ; mon corps et mon âme
réjouissent dans le Dieu vivant.
Heureux ceux qui habitent dans ta
maison ! Ils te louent sans cesse.
(Psaume 84:2-3-5)
V. Vous êtes maintenant dans la tristesse,
mais je vous reverrai et
votre cœur se réjouira, et
personne ne vous ravira votre joie.
(Jean 16:22)
Voyez : pendant peu de temps
la peine et le travail ont été mon lot,
et j'ai trouvé une grande consolation.
(Livre de l’Ecclésiastique 51:27)
Je vous consolerai comme une
mère console son enfant.
(Esaïe 66:13)
VI. Car ici-bas nous n'avons pas de
cité permanente, mais nous cherchons
celle qui est à venir.
(Hébreux 13:14)
Voyez, je vous dis un mystère :
nous ne mourrons pas tous,
mais nous serons tous changés,
en un moment,
en un clin d'œil,
au son de la dernière trompette.
Car la trompette sonnera et
les morts ressusciteront incorruptibles
et nous serons changés.
Alors cette parole de l'Écriture sera
accomplie : «La mort est engloutie
dans la victoire».
O mort ! Où est ton aiguillon ?
O enfer ! Où est ta victoire ?
(1 Corinthiens 15:51-55)
Seigneur, tu es digne de recevoir la
gloire, l'honneur et la puissance car tu
as créé toutes choses, et c'est par
ta volonté qu'elles existent et
qu'elles ont été créées.
(Apocalypse 4:2)
VII. Heureux dès à présent les morts
qui meurent dans le Seigneur !
Oui, dit l'Esprit, ils se reposent
de leurs travaux car leurs œuvres
les suivent.
(Apocalypse 14:13)