Verdi Messa da requiem
Musique de Giuseppe Verdi (1813-1901)
Composée pour l’anniversaire de la mort d’Alessandro Manzoni
Création : église San Marco, Milan, 22 mai 1874
En 1868, Verdi avait accepté de participer à la composition collégiale d’une messe en l’honneur de Gioachino Rossini et en avait réalisé l’ultime partie, le Libera me. Cette messe, jamais représentée, lui avait donné le désir d’en composer une intégralement. À la disparition du très admiré poète Alessandro Manzoni, ardent soutien, tout comme lui, de l’unification de l’Italie, le compositeur trouve l’occasion de réaliser son souhait. Célébrer la mort d’un si grand homme exigeait une partition exceptionnelle. Verdi s’attelle à la tâche et, un an après la mort de Manzoni, dirige son Requiem en l’église San Marco de Milan. Le succès est immense. À l’écoute de l’œuvre, le chef allemand von Bülow y entendra « un opéra en robe d’ecclésiastique », reflétant le rejet de certains pour cette œuvre grandiose. Le reste du monde n’aura pas cet apriori, probable survivance du schisme entre deux façons de concevoir le christianisme, et reconnaîtra dans ce Requiem l’adresse enfiévrée d’un génie à son créateur.
Œuvre aux proportions et au souffle titanesque, le Requiem, tout comme Don Carlo ou Aida, exige des interprètes d’exception. En réunissant leurs forces, l’Opéra de Monte-Carlo et l’Orchestre Philharmonique de Monte- Carlo se proposent de relever le défi lors d’une soirée exceptionnelle.
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE-CARLO
Chef d'orchestre
kazuki yamada
Chef de chœur
stefano visconti
solistes
Soprano
Marina rebeka
Mezzo-soprano
ekaterina semenchuk
Ténor
michael spyres
Baryton-basse
erwin schrott
CHŒUR DE L’OPÉRA DE MONTE-CARLO
Sopranos I
Galia BAKALOV
Antonella CESARIO
Chiara IAIA
MARIKO IIZUKA*
Giovanna MINNITI
MARNIE MIGLIORE*
Felicity MURPHY
BIAGIA PUCCIO*
ERICA RONDINI*
ILENIA TOSATTO*
Paola VIARA-VALLE
YUE WU*
Sopranos II
DAMIANA AVOGADRO*
Rossella ANTONACCI
ELISABETTA DAMBRUOSO*
Valérie MARRET
Letizia PIANIGIANI
Laura Maria ROMO CONTRERAS
VITTORIA GIACOBAZZI
VITTORIA VITALI*
Mezzo-sopranos
FRANCESCA BARGELLINI*
CECILIA BERNINI*
Teresa BRAMWELL-DAVIES
TINA CHIKVINIDZE*
FRANCESCA COPERTINO*
MATILDE LAZZARONI*
Géraldine MELAC
Suma MELLANO
Federica SPATOLA
VIKTORIIA TKACHUK*
Altos
ORNELLA CORVI
Maria-Elisabetta DE GIORGI
CHIARA LA PORTA*
CARLA MATTIOLI*
TANIA PACILIO*
Catia PIZZI
JANETA SAPOUNDJIEVA*
Paola SCALTRITI
LEONORA SOFIA*
Rosa TORTORA
Ténors I
Walter BARBARIA
Lorenzo CALTAGIRONE
Domenico CAPPUCCIO
ANDREA CIVETTA*
Vincenzo DI NOCERA
Thierry DIMEO
Nicolo LA FARCIOLA
MANFREDO MENEGHETTI*
JAIME ANDRES CANTO NAVARRO*
mICHELE PINTO*
DAVIDE URBANI*
Ténors II
HALIL UFUK ASLAN*
ARTURO ALBERTO CAPRARO*
Gianni COSSU
Pasquale FERRARO
BENOIT GUNALONS*
Fabio MARZI
EDER SANDOVAL GUEVARA*
Adolfo SCOTTO DI LUZIO
Salvatore TAIELLO
Barytons
JEAN-FRANCOIS BARON*
GABRIELE BARRIA*
Fabio BONAVITA
HYUNMO CHO*
Vincenzo CRISTOFOLI
Daniele DEL BUE
ROSARIO GRAUSO*
DEVIS LONGO*
KYLE PATRICK SULLIVAN*
Luca VIANELLO
Basses
Andrea ALBERTOLLI
STEFANO ARNAUDO*
Przemyslaw BARANEK
HUGUES GEORGES*
Paolo MARCHINI
MAX MEDERO*
FILIPPO QUARTI*
Edgardo RINALDI
Matthew THISTLETON
GIUSEPPE ZEMA*
*choristes supplémentaires pour ce concert
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE-CARLO
Directeur artistique et musical
KAZUKI YAMADA
Premiers violons
David Lefèvre
Liza Kerob
Sibylle Duchesne
Ilyoung Chae
Diana Mykhalevych
Gabriel Milito
Sorin Turc
Mitchell Huang
Thierry Bautz
Zhang Zhang
Isabelle Josso
Morgan Bodinaud
Milena Legourska
Jae-Eun Lee
Adela Urcan
NN
Seconds violons
Peter Szüts
Nicolas Delclaud
Camille Ameriguian-Musco
Frédéric Gheorghiu
Nicolas Slusznis
Alexandre Guerchovitch
Gian Battista Ermacora
Laetitia Abraham
Katalin Szüts-Lukacs
Eric Thoreux
Raluca Hood-Marinescu
Andriy Ostapchuk
Sofija Radic
Hubert Touzery
Altos
François Méreaux
Federico Andres Hood
François Duchesne
Charles Lockie
Richard Chauvel
Mireille Wojciechowski
Sofia Timofeeva
Tristan Dely
Raphaël Chazal
Ying Xiong
Thomas Bouzy
Ruggero Mastrolorenzi
Violoncelles
Thierry Amadi
Delphine Perrone
Alexandre Fougeroux
Florence Riquet
Bruno Posadas
Thomas Ducloy
Patrick Bautz
Florence Leblond
Thibault Leroy
Caroline Roeland
Contrebasses
Matthias Bensmana
Tarik Bahous
Mariana Vouytcheva
Jenny Boulanger
Sylvain Rastoul
Eric Chapelle
Dorian Marcel
NN
Flûtes
ANNE MAUGUE
RAPHAËLLE TRUCHOT BARRAYA
DELPHINE HUEBER
Piccolo
MALCY GOUGET
Hautbois
MATTHIEU BLOCH
MATTHIEU PETITJEAN
MARTIN LEFÈVRE
Cor anglais
Mathilde Rampelberg
Clarinettes
MARIE-B. BARRIÈRE-BILOTE
nn
Petite clarinette
DIANA SAMPAIO
Clarinette basse
Véronique Audard
Bassons
FRANCK LAVOGEZ
ARTHUR MENRATH
MICHEL MUGOT
Contrebasson
FRÉDÉRIC CHASLINE
Cors
PATRICK PEIGNIER
ANDREA CESARI
DIDIER FAVRE
BERTRAND RAQUET
LAURENT BETH
DAVID PAUVERT
Trompettes
MATTHIAS PERSSON
GÉRALD ROLLAND
SAMUEL TUPIN
RÉMY LABARTHE
Trombones
JEAN-YVES MONIER
GILLES GONNEAU
LUDOVIC MILHIET
Tuba
FLORIAN WIELGOSIK
Timbales & Percussions
Julien Bourgeois
Mathieu Draux
Antoine Lardeau
Noé Ferro
Harpe
SOPHIA STECKELER
Délégué artistique de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
Pourriez-vous, s’il vous plaît, nous présenter brièvement l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo et sa collaboration avec l’Opéra ?
L’OPMC a été créé en 1856 sous le règne de Charles III. Au fil des années, il est devenu la cheville ouvrière de l’activité musicale de la Principauté de Monaco, assurant non seulement les concerts symphoniques, mais aussi les représentations d’opéra et de ballet. Très vite, l’orchestre a acquis une position prépondérante sur la scène musicale européenne car cette capacité à pouvoir interpréter tous les répertoires lui a permis de se forger une faculté d’écoute et d’adaptabilité musicale incontestables.
La collaboration entre l’Orchestre et l’Opéra est une composante essentielle de l’activité artistique de la Principauté. Personnellement, je pense que l’harmonie entre nos deux entités est indispensable et que les difficultés éventuelles doivent rester d’ordre purement pratique, car ce qui compte le plus, c’est toujours le résultat artistique.
Le Requiem de Verdi n’est pas considéré par tous comme une œuvre sacrée, mais plutôt comme une pièce de concert. Cela en fait-il un élément habituel du répertoire d’un orchestre symphonique ?
Nous sommes particulièrement heureux de participer avec l’Opéra, cet automne, à une représentation du Requiem, placé sous la direction de Daniel Barenboim. Le Requiem de Verdi, tout comme ceux de Mozart, Berlioz, Brahms, Fauré et bien d’autres, est une œuvre de musique sacrée qui fait partie du répertoire habituel des orchestres symphoniques, pouvant être jouée dans un lieu sacré, mais plus souvent dans des salles de concerts, et quelquefois dans certains théâtres d’opéra qui offrent des concerts symphoniques dans leurs saisons, comme la Scala. Mais il est tout à fait légitime que pour un tel événement à Monaco, nous unissions toutes nos forces orchestrales, chorales et solistes pour présenter ce Requiem au public monégasque.
Quelles sont, à votre avis, les qualités de cette œuvre ?
Ce Requiem est, pour moi, l’un des plus spectaculaires de l’histoire de la musique. C’est aussi une œuvre aux multiples facettes. Certains chefs l’ont abordé de façon extrêmement théâtrale, en y voyant un lien direct avec l’un des plus grands compositeurs d’opéra de tous les temps. D’autres chefs ont abordé ce Requiem en cherchant à offrir une œuvre profondément mystique et religieuse. Chacune de ces visions étant tout à fait cohérente.
Lorsque meurt Gioachino Rossini, le 13 novembre 1868, Verdi se montre très touché. Il lance auprès de son éditeur, Tito Ricordi, l’idée d’un requiem à la mémoire du compositeur du Barbier de Séville écrit par dix sommités musicales italiennes et exécuté le jour anniversaire de sa disparition, en son fief de Bologne. Lui-même s’octroie le finale, le Libera me. La Messe pour Rossini est composée, mais diverses raisons font échouer son exécution. Elle vivra cependant au travers de la Messe de requiem, dans laquelle Verdi reprend tout naturellement le fragment inutilisé.
En fait, Verdi a envisagé d’écrire un requiem complet dès l’abandon du projet de la Messe pour Rossini, et en avril 1873 il s’est fait restituer dans ce dessein le manuscrit du Libera me. Le 22 mai, la disparition de l’écrivain Alessandro Manzoni lui fournit l’impulsion décisive. Profondément affecté, Verdi n’a pas le cœur d’assister aux funérailles. Dès le lendemain, il écrit à Ricordi : «Je viendrai sous peu me recueillir sur sa tombe, seul et sans être vu, et peut-être (après plus ample réflexion et après avoir pesé mes forces) pour proposer quelque chose afin d’honorer sa mémoire.» Le 2 juin, il tient sa promesse et se rend au Cimetière monumental de Milan. Le lendemain, par l’intermédiaire de Ricordi, il propose au maire de la capitale lombarde l’exécution d’un requiem lors des cérémonies solennelles qui commémoreront le premier anniversaire de la mort de Manzoni. L’idée est acceptée.
Si Verdi achève la partition à temps, les préparatifs du concert posent de nombreux problèmes techniques, politiques et liturgiques. Le 22 mai 1874, l’auteur dirige lui-même la première, en l’église San Marco. Le Requiem est repris trois fois à la Scala, puis donnés à Paris, New York, Londres et Vienne. Pour la création anglaise, le 15 mai 1875, Verdi présente une nouvelle version du «Liber scriptus» (Séquence) : au lieu d’une fugue pour chœur et orchestre, le public londonien découvre le solo de mezzo-soprano que l’on connaît aujourd’hui.
La partition
Même si Verdi ne reprend pas à l’identique le Libera me pour Rossini, l’essentiel en est conservé. Par ailleurs, grâce aux répétitions textuelles, la musique de ce mouvement sert de noyau à celle de deux autres morceaux : l’Introït (la section «Requiem») et la Séquence (la section «Dies iræ»). Dans le «Lacrymosa», extrait lui aussi de la Séquence, Verdi réutilise la musique d’un beau duo du quatrième acte de Don Carlos (1867), qu’il avait été contraint de couper pour se plier aux exigences horaires du public de l’Opéra de Paris : Philippe II y pleure auprès de son fils la mort du marquis de Posa, assassiné par l’Inquisition («Qui me rendra ce mort…»).
L’œuvre s’ouvre dans le plus grand recueillement et se referme sur le murmure effrayé de la soprano solo, en équilibre au-dessus du gouffre, au bord de l’anéantissement. Entre-temps, la partition sera passée par les sentiments les plus contrastés, d’un lyrisme presque sensuel, de l’humble supplique à la violence abasourdissante du «Dies iræ», peinture effrayante du Jugement dernier.
Théâtral ou religieux, ce Requiem ? Verdi se préoccupait peu de cette question, lui qui adopta envers la religion une attitude ambiguë, marquée de respect, de conservatisme et d’incrédulité. «La mort, c’est le néant. Le Ciel est une vieille fable», crie Iago à la fin de son Credo, dans Otello. Verdi, qui n’était guère plus convaincu de l’existence d’un au-delà, écrit son Requiem pour les vivants, non pour les morts ou pour Dieu. Et l’œuvre n’est pas théâtrale : elle n’est que profondément humaine.
Claire Delamarche