Mozart Don Giovanni
Dramma giocoso en deux actes KV 527
Musique de Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Livret de Lorenzo Da Ponte
Création : Prague, Théâtre national du comte Nostic, 29 octobre 1787
Dans le cadre du festival Mozart à Monaco proposé par l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
L’imposante Staatsoper de Vienne, telle que nous la connaissons aujourd’hui, est inaugurée le 25 mai 1869 pour succéder à l’Opéra de la Cour impériale. L’opéra joué ce jour-là devant l’empereur François-Joseph et son épouse Élisabeth est Don Giovanni de Mozart. Depuis l’éblouissante « Semaine Rossini » que l’Opéra de Monte-Carlo a présentée à Vienne en 2022, les deux maisons ont commencé à se rendre visite régulièrement. C’est ainsi que Le nozze di Figaro a donné le coup d’envoi d’une nouvelle trilogie Mozart/Da Ponte, interprétée dans notre théâtre de Monaco par la troupe de la Staatsoper de Vienne et son orchestre à la tradition stylistique inégalable. Le succès de ces Nozze au printemps 2023 est resté vivace, et c’est avec impatience que nous attendons le retour de nos amis viennois en Principauté pour une version semi-scénique du mythique Don Giovanni.
Orchestre de la Staatsoper de Vienne
Monsieur Mozart – La clemenza di Tito et Don Giovanni : deux opéras totalement opposés, n’est-ce pas ?
En effet. Le premier est un opéra majestueux reposant sur un des livrets d’opera seria les plus usités, tandis que l’autre est un dramma giocoso qui s’inspire de ce genre de farce paillarde que nous avons pu voir dans les théâtres de faubourg ou sur les champs de foire.
Existe-t-il un point commun entre les deux ?
Prague ! Il régnait un esprit de rivalité entre la capitale de la Bohême et Vienne, qui était à l’époque le centre de l’Empire austro-hongrois, auquel la Bohême était soumise. Mais l’éducation musicale et la musique en général ont prospéré largement à Prague pendant des siècles, alors qu’à Vienne, elles étaient réservées en grande partie aux cercles aristocratiques et à la Cour impériale. Et comme vous le savez, la plupart de ces personnes n’étaient pas particulièrement bien disposées à l’égard de mon travail. La ville de Prague était bien différente de celle de Vienne et comptait de nombreux et excellents théâtres, gérés par des sociétés privées. L’un d’eux m’a invité à superviser une représentation de mes Nozze di Figaro. Devant l’énorme succès rencontré, il m’a immédiatement commandé un nouvel opéra. Mon choix s’est porté sur Don Giovanni, un sujet qui, bien sûr, faisait froncer les sourcils de la cour conservatrice de Vienne. À Prague, en revanche, tout le monde a adoré cet opéra et s’est réjoui que j’aie accepté de composer ce nouveau titre. C’est ainsi qu’une autre commande de Prague arriva quatre ans plus tard, cette fois-ci de la part des États de Bohême, à l’occasion du couronnement de l’empereur d’Autriche Léopold II comme roi de Bohême. Ce fut La clemenza di Tito.
Le premier soir, le couple impérial arriva au théâtre avec une heure de retard. Il n’est pas étonnant que le public ait réagi avec une certaine retenue…
Au début du XIXe siècle, La clemenza di Tito est devenu l’un de mes opéras les plus joués ! Par la suite, il a perdu ses admirateurs car son sujet était considéré alors comme dépassé. Don Giovanni a pris la relève, ainsi que La Flûte enchantée, composée en même temps que ma Clemenza.
Qu’en est-il de leur musique et de leur style ?
Dans Don Giovanni, j’ai pu développer mes concepts sur la structure et le style. Le déroulement dramatique de l’histoire détermine tout, la musique fait avancer l’action, souligne et régit ce qui se passe avec les personnages. Les mots, qui sont d’un grand naturel, souvent drôles voire obscènes, m’ont beaucoup aidé. Je dois remercier le fantastique Lorenzo Da Ponte pour cela.
Mais n’oubliez pas que, dans La clemenza di Tito, mon librettiste Caterino Mazzolà a fait un travail formidable pour resserrer l’intrigue de Métastase et rendre les personnages le plus réels possible. L’intrigue appartient à une époque révolue, mais j’ai souhaité briser la succession traditionnelle et rigide des arias da capo pour écrire plus d’ensembles, apporter davantage d’émotion, faire moderne.
Mais je ne dirai jamais que j’ai préféré l’un à l’autre : les deux sont comme mes enfants, et chacun d’entre eux est aimé d’un même amour !